TCHICAYA U TAM’SI

TCHICAYA U TAM’SI
TCHICAYA U TAM’SI

TCHICAYA U TAM’SI (Gérald-Félix TCHICAYA, dit) 1931-1988

Appartenant à une éminente famille du pays vili, né à M’Pili, dans la région du Kouilou, fils d’un instituteur qui devait devenir le premier député noir représentant la colonie du Moyen-Congo à l’Assemblée nationale française, Gérald-Félix Tchicaya est tôt venu en France pour y étudier. Adolescent rebelle, souffrant dans sa chair (il devra être opéré d’une malformation du pied), il trouve dans la poésie, découverte notamment à travers Rimbaud, la voie royale de sa révolte, individuelle et déjà collective. D’où le pseudonyme qu’il choisit lors de la publication de son premier recueil: Tchicaya U Tam’si, qu’il se plaisait à traduire par «petite feuille qui parle pour son pays». Installé dans la région parisienne, préférant aux cursus universitaires les petits métiers et les cafés littéraires de la rive gauche, travaillant beaucoup pour la radio, il retrouve l’Afrique en 1960, lors de l’accession à 1’indépendance de l’ancien Congo belge. Il est à Léopoldville (aujourd’hui Kinshasa) le directeur, pendant six mois, du journal Congo , publié par le Mouvement national congolais de Patrice Lumumba, et assiste aux convulsions qui marquent la naissance du futur Zaïre. Méfiant envers le régime qui prend en charge, à Brazzaville, le nouveau Congo indépendant (son président, l’abbé Fulbert Youlou, avait réussi à éliminer son père de la scène politique), il trouve à l’U.N.E.S.C.O., à Paris, des postes qui lui permettent de poursuivre son œuvre littéraire. Tchicaya U Tam’si est bientôt devenu le témoin passionné du passage à l’âge adulte de la littérature africaine de langue française.

Dès les premiers vers du poème qui ouvre son premier recueil publié (Le Mauvais Sang , 1955), la note fondamentale de la poésie de Tchicaya U Tam’si est bien reconnaissable: Pousse ta chanson / Mauvais sang / comment vivre / l’ordure à fleur de l’âme, être à chair regret.

Lyrisme, ironie (et d’abord envers soi-même), ellipses, ruptures des tons et des images, éclats baroques des brisures et des collages: ce seront les traits caractéristiques de tous les recueils, dont les titres, à chaque fois, refléteront l’inspiration: Feu de brousse (1957) ou la violence purificatrice; À triche-cœur (1958); réponse au «comment vivre» des débuts; Épitomé (1962), abrégé de la «passion» de Patrice Lumumba, martyr des indépendances africaines. Le Ventre (1964) se veut recherche des origines, tandis qu’Arc musical (1970) explore tous les pouvoirs de la poésie. La Veste d’intérieur (1977) montre une thématique plus intimiste. Cette poésie, qui ne s’aveugle d’aucun mot d’ordre, et pas même de ceux de la négritude, affirme sa souveraineté («Ma poésie est une politique»). Elle retrace l’itinéraire d’une conscience révoltée en quête d’harmonie, cosmique ou amoureuse.

En 1980, la publication des Cancrelats (reprise d’un texte écrit depuis longtemps) transforme le poète en romancier. Suivront, outre un recueil de nouvelles (La Main sèche , 1980), Les Méduses (1982) et Les Phalènes (1984). Cette trilogie romanesque, construite autour de l’histoire d’une famille, qui permet à l’auteur de retracer la chronique de la colonie du Moyen-Congo dans la première moitié du XXe siècle, jusqu’à la veille de l’indépendance. Ces Fruits si doux de l’arbre à pain (1987) la prolonge en évoquant les premières crises politiques après l’indépendance. Ces romans rompent avec la mise en perspective classique: point de narration unifiée, mais des voix multiples, relayant les propos et les pensées de nombreux personnages, brouillant la chronologie et les frontières du réel, rendant la lecture problématique par des effets de silence, des ellipses, et par tout un implicite culturel qui ancre le texte dans la réalité et dans l’imaginaire congolais. Reprenant pour le théâtre une série radiophonique, Le Zulu s’inspire de l’histoire de Chaka, fondateur d’un État zoulou au début du XIXe siècle. Cette tragédie du pouvoir, qui est aussi méditation sur la modernisation de l’Afrique, fut représentée au festival d’Avignon en 1976. La satire du pouvoir délirant des tyrans modernes se déploie dans une «comédie-farce sinistre», Le Destin glorieux du maréchal Nnikon Nniku Prince qu’on sort (1979). Sa dernière pièce, Le Bal de N’Dinga , a connu un grand succès en 1988. Tchicaya U Tam’si, qui n’a cessé de demander des comptes aux images maternelles décevantes, a toujours revendiqué l’amour le plus exigeant pour l’Afrique.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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